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Un réseau d’éclaireurs pour la santé mentale

Le réseau d’éclaireurs entrera en action dès septembre Photo: Aleksandr Davydov - 123rf

Seize mois après le début de la pandémie, un adulte québécois sur cinq souffre de symptômes anxieux ou dépressifs. Afin d’aider la population à se rétablir, le CIUSSS de l’Est lancera d’ici l’automne un réseau d’« éclaireurs », formé de citoyens qui auront la tâche de repérer le mal-être chez leurs confrères et de leur tendre la main.

Formés par la Croix-Rouge en premiers soins psychologiques, les éclaireurs devront rediriger les citoyens vers les ressources appropriées, soit dans les milieux communautaire ou de la santé.

« Il y a des gens qui vivent de la détresse situationnelle, peut être que c’est un deuil ou une perte d’emploi. On peut connecter ces gens avec des groupes pour le deuil, un réseau local pour l’emploi ou un organisme pour le retour au travail », illustre Jonathan Brière, directeur des Programmes santé mentale, dépendance et itinérance pour le CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal.

Les jeunes plus à risque

Le besoin d’éclaireurs pour venir en appui au réseau de la santé est d’autant plus frappant à la lumière des données sur la santé mentale, constate Mélissa Généreux, professeure à l’Université de Sherbrooke.

Chercheuse principale d’une étude qui évalue la réponse de la population québécoise au niveau psychologique et comportemental face à la pandémie, cette dernière observe peu d’amélioration lors du dernier sondage mené ce printemps.

«On voit que les symptômes compatibles avec un trouble d’anxiété généralisée ou un trouble de dépression majeure, c’est 21% à échelle des adultes québécois. C’était 23% en février, et 23% en novembre. C’est comme si ça a atteint un plateau négatif en plein creux de deuxième vague. »

La santé mentale des jeunes adultes de 18 à 24 ans et des étudiants récupérerait d’ailleurs plus lentement que celle des 25-44 ans et des travailleurs.

Plus préoccupant, l’étude révèle que les idées suicidaires rapportées ont fait un bond chez les jeunes adultes, « passant de 6-7% en février à 10% » en mai/juin. «Il faut qu’on mette les bouchées doubles à la rentrée scolaire pour offrir le meilleur environnement pour récupérer sur le plan psychologique.»

L’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) mène également un sondage chez les 18 ans et plus sur le bien-être émotionnel et la santé mentale en contexte de pandémie, et constate également que les jeunes pâtissent le plus. Marie-Claude Roberge, conseillère scientifique à l’INSPQ, rappelle toutefois que les jeunes adultes ont historiquement la santé mentale la moins bonne.

Déconfinement? Oui, mais….

Du côté de l’INSPQ, un constat est évident: «chaque fois qu’il y a des mesures de confinement, les indicateurs de santé mentale se détériorent», explique Mme Roberge.

Des indicateurs de l’étude menée par Mme Généreux suggèrent le même constat. Or, elle met en garde: «on ne peut pas penser que parce que les mesures sont levées, tous ces impacts vont se lever en même temps.»

Avec la vaccination qui n’est pas terminée et les « variants qui rôdent », M. Brière rappelle d’ailleurs que « la pandémie n’est pas terminée ». Dans ce contexte, la résilience des citoyens passera par le fait d’apprendre à vivre avec la «nouvelle normalité».

« Il faut absolument que les gens se fassent vacciner. C’est la clé pour le rétablissement de la population et pour ne pas revivre de confinement comme on a vécu dans les derniers mois. »

Le financement pour le réseau d’éclaireurs ne sera que pour une durée de 14 mois.  «On va essayer de voir comment on peut pérenniser ce réseau par la suite dans la communauté», souligne M. Brière.

Un modèle inspiré de la tragédie de Mégantic

Le réseau d’éclaireurs est inspiré d’une initiative déployée en Estrie en réponse à la tragédie ferroviaire survenue à Lac-Mégantic en 2013. Celle qui était directrice de la santé publique de l’Estrie à l’époque, Mélissa Généreux, avait œuvré à déployer des projets pour renforcer la résilience des individus et des collectivités. Son constat: le nombre de personnes fréquentant les hôpitaux ne reflétait pas la détresse observée dans les études.

«Plutôt que d’attendre que les gens qui souffrent viennent nous voir, c’est de travailler et élargir le bassin de gens de la communauté qui comprennent ce qui se passe et qu’ils ont un rôle à jouer. (…) Parfois c’est juste de mettre sur pied un espace où les gens peuvent s’exprimer, un espace de parole où on sent qu’on ne sera pas jugé. Des choses comme ça qui peuvent faire autant de bien qu’un antidépresseur. »

Inspiré par le succès de cette approche, Québec a déployé à l’automne 2020 un financement de 19 millions pour mettre en branle un réseau d’éclaireurs partout dans la province.

Si vous ou une personne dans votre entourage avez besoin d’aide, vous pouvez appeler Suicide Action Montréal au 1 866 APPELLE. Des intervenants sont disponibles 24 heures sur 24 et sept jours sur sept pour vous aider.

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